Le gouvernement gabonais passe à l’offensive sur le front des recettes publiques. Le ministre de l’Économie, des Finances, de la Dette et des Participations, chargé de la Lutte contre la Vie Chère, Henri-Claude Oyima, a annoncé, le mardi 14 octobre 2025, le lancement d’une vaste opération de recouvrement fiscal. Objectif : récupérer plus de 803 milliards FCFA (environ 1,4 milliard de dollars) d’impôts non versés par les entreprises au cours des deux dernières années.
Selon les données communiquées par le ministère, ces arriérés se décomposent en 531 milliards FCFA pour l’exercice 2023 et 273 milliards FCFA pour 2024. Ces montants concernent principalement les centres fiscaux relevant de la Direction générale des Impôts (DGI). Il s’agit de créances identifiées à la suite d’un audit approfondi des dettes fiscales, mené par la task force spéciale mise en place en septembre 2023. Cette cellule, chargée de dresser un état des lieux complet de la dette intérieure et extérieure du pays, a mis en lumière d’importants manquements dans le paiement des obligations fiscales de nombreuses entreprises opérant sur le territoire.
Cette opération de recouvrement s’inscrit dans une stratégie plus large de redressement et de transparence des finances publiques. Depuis plusieurs mois, le gouvernement s’emploie à moderniser la gestion de la dépense publique et à renforcer la discipline budgétaire. « L’objectif est de restaurer la confiance dans la gouvernance économique et d’assurer une meilleure mobilisation des ressources internes », précise le ministère de l’Économie.
Accroître les recettes non pétrolières
Henri-Claude Oyima a souligné que la lutte contre l’évasion et la fraude fiscales constitue désormais une priorité nationale. L’enjeu est de taille : dans un contexte de ralentissement de la croissance et de dépendance persistante aux revenus pétroliers, le pays doit diversifier ses sources de financement. Le renforcement du recouvrement fiscal apparaît ainsi comme un levier essentiel pour accroître les recettes non pétrolières et soutenir les politiques publiques, notamment dans les secteurs sociaux et les infrastructures.
Malgré les efforts déployés, les performances de recouvrement restent en deçà des attentes. En 2024, le Gabon n’a collecté que 1080,73 milliards FCFA de recettes fiscales, soit 60,45 % de l’objectif fixé à 1787,8 milliards FCFA. Ce déficit témoigne des faiblesses structurelles du système fiscal, marquées par une assiette étroite, un contrôle limité et une dépendance excessive à quelques grands contributeurs.
Ce constat a conduit le gouvernement à renforcer les contrôles et à digitaliser les procédures fiscales pour améliorer la traçabilité des paiements et réduire les marges de manœuvre des fraudeurs. Les autorités misent également sur une meilleure coordination entre les services fiscaux, douaniers et comptables pour fluidifier la chaîne de recouvrement et limiter les pertes de recettes.
Un plan stratégique pour redresser la situation
Afin de corriger ces déséquilibres, le ministère de l’Économie déploie un plan stratégique 2025-2027, qui vise à générer 3738,9 milliards FCFA de recettes fiscales hors pétrole sur trois ans. Ce programme s’appuie sur plusieurs axes majeurs : l’élargissement de l’assiette fiscale, notamment à travers l’intégration de nouveaux secteurs et l’amélioration de l’identification des contribuables, le renforcement du contrôle fiscal, pour s’assurer du respect des obligations et sanctionner les contrevenants, et l’amélioration de l’efficacité du recouvrement, via des outils numériques et une formation accrue des agents des impôts.
Pour Henri-Claude Oyima, cette démarche traduit la volonté du gouvernement de rompre avec les pratiques laxistes du passé et de consolider les bases d’une économie plus autonome et résiliente. La réussite de cette opération de recouvrement, qui cible plusieurs centaines d’entreprises, pourrait constituer un signal fort envoyé aux partenaires financiers et aux investisseurs quant à la rigueur nouvelle de la gestion publique gabonaise. En récupérant ces 803 milliards FCFA, le Gabon espère renforcer sa trésorerie, réduire le déficit budgétaire et accroître sa capacité à financer les priorités nationales, dans un contexte où chaque franc compte pour soutenir la relance économique post-crise. Cette initiative marque ainsi une étape déterminante dans la refondation du système fiscal gabonais, appelée à devenir un pilier de la souveraineté financière du pays.


